L'écriture d'une icône s'éloigne de l'art réaliste : la perspective est inversée, les couleurs, la lumière, l'or sont symboliques et renvoient à l’Eternel. A travers l'icône, le croyant manifeste sa foi et sa vénération non pas envers une simple image, mais vers son archétype, un Dieu qui s'est manifesté dans la nature humaine de son fils Jésus, qui a pris chair en la Vierge Marie, qui a vécu et prêché auprès de ses apôtres et parmi les hommes de son temps, ainsi qu'envers les grands Saints qui ont proclamé leur foi et marché dans les pas du Christ, parfois jusqu'au martyre.
« Loin d'être pour nous un objet de délectation esthétique ou de curiosité scientifique, l'icône a un sens théologique très net : de même que l'art profane représente la réalité du monde sensible et émotionnel tel qu'il est vu personnellement par l'artiste, l'icône représente la réalité du Royaume qui n'est pas de ce monde, telle que nous l'enseigne l'Église. Autrement dit, elle représente, à l'aide de symboles, ce même monde sensible et émotionnel, délivré du péché, transfiguré et déifié. » Léonide Ouspensky, iconographe.
L'origine des icônes selon les historiens
Les historiens de l'art s'accordent à faire remonter l'origine des icônes, aux fresques étrusques et juives (plusieurs siècles avant le Christ), retrouvées lors de fouilles, sur les murs de certains édifices. L'art des fresques retrouvées dans les catacombes romaines des tout premiers siècles après le Christ, serait la continuation de cette pratique de la peinture murale : habitués ainsi à l'ornementation de leur lieu de culte, les premiers juifs convertis continuèrent cet art de la fresque en osmose avec les civilisations grecques et romaines pour décorer les murs des maisons ecclésiales chrétiennes.On a retrouvé par exemple, en 1932, à Doura-Europos en Syrie, sur les murs d'une synagogue datant du IIIe siècle avant Jésus-Christ, des fragments de fresques représentant des scènes bibliques. En Egypte, les portraits funéraires dit du Fayoum, datant du IIIe siècle, réalisés sur des planches en bois avec usage de pigments et de cire chaude attestent également l'origine de l'iconographie chrétienne qui reprendra les mêmes techniques d’exécution.
A partir de cet art chrétien des catacombes se développe une pratique qui devient, dès le VIe siècle (époque à laquelle remontent les premières icônes que l'on possède encore aujourd'hui, dont celles du monastère Sainte Catherine du Sinaï), très populaire : la prière devant l'icône. Mais dans la grande tradition byzantine de l'iconographie chrétienne, deux autres sources sont à signaler pour expliquer le rôle si important de l'icône dans la prière et dans l'art de l'Eglise d'Orient :
- les icônes "acheiropoïètes" (ou encore "tombées du ciel"), c'est-à-dire non faites de main d'homme :
Dès le VIe siècle en effet, l'on commence à vénérer des icônes dont l'origine semble inconnue et très antérieure au VIe siècle. Parmi ces icônes, certaines sont même considérées comme miraculeuses, car non faites de main d'homme comme par exemple celle du Mandylion de la Sainte Face (dite "Image d'Edesse" car retrouvée dans une église d'Edesse) que l'on attribue à un don du Christ Lui-Même ;
- les icônes dites "de saint Luc l'Evangéliste" :
En effet, chez les chrétiens des premiers siècles, la tradition courait que l'un des quatre évangélistes, saint Luc, qui était aussi médecin à l'époque du Christ, et portraitiste, avait peint plusieurs portraits de la Vierge Marie, d'après nature et dans trois attitudes différentes : la Vierge "Hodigitria" (Celle qui montre le chemin), la Vierge "Eleousa" (ou Mère de miséricorde et de tendresse), la Vierge Orante (dite encore "Playtera"). Quelques siècles plus tard, ces trois modèles byzantins anciens deviendront la référence de la peinture d'icônes.
Aussi l'icône n'est-elle pas une simple oeuvre d'art mais un objet culturel et cultuel complexe, exprimant des idées théologiques définies par les Pères de l'Eglise et répondant à des canons très stricts établis dans la tradition pour renforcer le sens sacré de son message.
L’icône est un objet de culte emblématique de la chrétienté orthodoxe. Principal intercesseur entre le fidèle et le sacré (Dieu, un saint, un événement), elle est un élément essentiel des pratiques religieuses et sans elle la structuration de l’espace sacré de l’église orthodoxe, la célébration des offices et des cérémonies solennelles sont impensables. Certaines icônes font l’objet d’une vénération particulière grâce au pouvoir spécifique dont elles seraient investies. Qualifiées de miraculeuses, ces icônes étaient, au Moyen Âge, des symboles religieux essentiels de l’État, sortes de palladium assurant la défense et la protection de l’Empire (Byzance), mais aussi de chaque ville, de chaque monastère, de chaque famille. Elles continuent à jouer un rôle important dans la vie sociale des communautés orthodoxes.
Depuis quelques années, les chrétiens de confession catholique réutilisent de plus en plus l'icône dans la liturgie, sans lui donner la même richesse que dans l'usage qu'en font les chrétiens orthodoxes.